LE MOUSTERIEN ET/OU L'ATERIEN ET L'IBEROMAURUSIEN DANS LE CONTEXTE LITTORAL MAGHREB MEDITERRANEEN
Mourad Betrouni  1, *@  
1 : Centre national de recherches préhistoriques anthropologiques et historiques, Algérie
* : Auteur correspondant

C'est sur le littoral Maghreb méditerranéen que s'offre, le plus surement, le schéma chrono-culturel du Moustérien et/ou l'Atérien et de l'Ibéromaurusien, car inscrit dans un système référentiel de grande portée régionale: le Pléistocène supérieur, une épaisseur de temps exprimée par des enregistrements morpho-sédimentaires remarquables, qui s'étalent depuis le Riss-Würm (stade isotopique 5e) jusqu'à la fin du premier inter-pléni-glaciaire (stade isotopique 3). Le deuxième pléni-glaciaire (stade isotopique 2) ne semble pas avoir laissé de traces notables dans le paysage littoral; une lacune dans les connaissances - véritable pierre d'achoppement - qui n'a pas été suffisamment interrogée, notamment dans sa dimension sédimentaire. Elle a été, le plus souvent, surmontée par l'idée d'un hiatus culturel, désignant un moment d'abandon de site, un vide anthropologique et culturel, une hypothèse qui a fini par se convertir en une rupture épistémologique entre « deux mondes géologiquement et archéologiquement distincts ».

 Toute une construction intellectuelle, articulée autour de mouvements de migration et de déplacement de populations, consistait à réduire ou élargir le hiatus, tantôt en vieillissant tantôt en rajeunissant le Moustérien, l'Atérien ou l'Ibéromaurusien, en demeurant, cependant, dans les mêmes épaisseurs de sédiments. Les recherches en préhistoire et géologie du quaternaire, effectuées sur la façade atlantique du Maroc et les découvertes récentes, réalisées au Maroc oriental, ont, emprunté de nouvelles voies, allant au-delà des approches culturalistes, pour parvenir à des lectures transversales, plus ouvertes, usant d'autres méthodes et matériaux d'examen. Des avancées considérables ont été enregistrées dans la production de la connaissance, sans arriver, cependant, à déplacer véritablement le sujet sur un autre terrain d'exercice de la pensée.

Dans la présente contribution, nous voulions emprunter une voie qui garantirait, d'abord, la cohérence et la concordance des données. L'idée consistant à aller au-delà de l'approche classique par site, qui a la faiblesse de la décontextualisation, pour accéder à une vision plus intégrale – géosystémique - usant d'une grille de lecture et d'analyse qui autorise les corrélations et les comparaisons sur des échelles spatio-temporelles requises. La dimension anthropo-culturelle n'étant envisagée, dans ce cas, qu'aux termes du « récit sédimentaire », étant entendu qu'en tout lieu et en tout moment l'homme préhistorique représente un temps et un contenu géologique.

La grille de lecture et d'analyse, que nous préconisons, est puisée du cadre régional Maghreb-méditerranéen, qui offre cette image d'une bande littorale parallèle à la mer, disposée en une alternance d'assises plastiques néogènes, étirées longitudinalement et de massifs rigides anté-néogènes, plus ramassés et davantage élevés. Un dispositif, qui est le produit de l'histoire géologique alpine en domaine tellien, celui des Maghrébides, véritable orogène, développé d'est en ouest, depuis l'Atlantique jusqu'à la mer ionienne (Italie). C'est sur cette bande de relief, tel un palimpseste, que se sont enregistrées les traces des établissements humains préhistoriques, Leur absence où leur présence, outre les conditions de conservation, sont le plus souvent liées à l'histoire particulière des affleurements qu'à celle des établissements humains proprement dits. C'est dans cette signification, pensons-nous, que se comprendrait la rareté des gisements préhistoriques pendant le pléistocène inférieur et moyen et leur remarquable densité dès le pléistocène supérieur.

Devant l'étendue géographique de ce sujet, et pour les besoins de cette contribution, nous avons circonscrit notre sujet à un segment de la bande littorale maghrébine: Le « Sahel occidentale d'Alger » : une entité morpho-structurale formée d'une assise plastique plio-pléistocène, allongée est-ouest parallèlement à la mer, adossée à deux massifs rigides anté-néogènes, la « Bouzaréa » à l'est et le « Chenoua » à l'ouest. D'une centaine de kilomètres de longueur et une dizaine de kilomètres de grande largeur, ce segment de littoral présente un grand intérêt au point de vue géologique et archéologique.



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