Les cultures paléolithiques à bifaces du Pléistocène inférieur et moyen en Afrique, en Europe, au Proche-Orient, en Asie Centrale et orientale et dans le Sud-Est asiatique, souvent appelées acheuléennes, correspondent-elles à une culture homogène, ayant une origine commune, qui aurait diffusée progressivement à travers différents continents en acquérant progressivement des caractères propres ?

Elles sont caractérisées par la présence, plus ou moins abondante de bifaces, des outils lithiques à symétrie bilatérale et souvent bifaciale, plus ou moins excellente, sur des roches souvent de bonne qualité et parfois de belle couleur, qui témoignent de l'émergence dans la cognition humaine du sens de la symétrie et, dans une certaine mesure, du sens de l'esthétique

La présence de bifaces, en proportions très variables dans les assemblages lithiques, pouvant varier de moins de 1% jusqu'à plus de 30 %, est l'élément principal qui parfois a permis de les dénommer.

En Afrique, les plus anciennes cultures à bifaces, généralement dénommées acheuléennes, sont présentes dès 1,75 MA, en Afrique de l'Est, par exemple à Konso Gardula. Elles sont associées à la présence de pics, de hachereaux, de polyèdres et de grands éclats bruts de taille. Les petits outils retouchés sur éclat ou sur débris sont rares et de facture médiocre. Elles sont portées par des Homo erectus archaïques (Homo ergaster) et des Homo erectus classiques.

Au Proche-Orient, les cultures du Paléolithique ancien à biface sont présentes dès 1,4 million d'années, à Ubeydia par exemple. Elles se caractérisent, comme en Afrique, par la relative abondance de grands éclats à tranchant brut de taille, une assez forte proportion de galets aménagés, la présence significative de polyèdres, de pics, de hachereaux et une proportion un peu plus importante de petits outils retouchés de meilleure facture que dans les sites africains.

En Europe, les industries du Paléolithique ancien à bifaces apparaissent à une époque plus récente qu'en Afrique et au Proche-Orient. Elles sont présentes à partir de 0,7 à 0,6 MA portées par des Homo erectus européens évolués, comme à la Caune de l'Arago à Tautavel, (souvent appelés Homo heidelbergensis).

Les proportions de bifaces dans des assemblages lithiques sont généralement peu importantes, les pics sont plus rares qu'en Afrique, les hachereaux de type africain très rares ou absents, ainsi que les polyèdres. En revanche, les petits outils retouchés sur éclat ou sur débris, d'excellente facture, sont relativement abondants.

Sur les différents continents, l'apparition des cultures du Paléolithique ancien à bifaces, toujours associées à de grands éclats à longs bords tranchants bruts de taille, est liée à un nouveau comportement des hommes qui ont abandonné ou réduit leurs activités de charognage pour devenir des chasseurs

Les cultures du Paléolithique ancien à bifaces et à grands éclats à tranchant brut de taille paraissent donc bien correspondre à un nouveau comportement en relation avec les activités des premiers peuples chasseurs qui avaient besoin de grands couteaux pour découper le cuir des grands herbivores qu'ils avaient abattus à la chasse.

Les idées se propageant plus rapidement que la migration de peuples, il est possible que la notion de symétrie, ait diffusée progressivement à travers les différents continents.

Il est néanmoins évident que l'évolution des cultures du Paléolithique ancien à bifaces, souvent réunies artificiellement sous le nom d'Acheuléen, ont évolué indépendamment sur les différents continents.