Apport de la scanographie à l'interprétation embryologique de la base du crâne et de son évolution posturale chez les hominiens/ Contribution of the computerized tomography to the embryological interpretation of the skull base and its postural evolution in hominins
Anne Dambricourt MalassÉ  1@  , Fabienne Lallouet  2@  
1 : UMR 7194 CNRS Histoire naturelle de l'Homme préhistorique
CNRS : UMR7194 CNRS Histoire naturelle de l'Homme préhistorique, Muséum national d’Histoire naturelle, UMR 7194 CNRS-MNHN, Paris.
2 : Hopital Américain de Paris
Hopital Américain de Paris, Service d'Imagerie Médicale

Chez l'Homo sapiens Linnaeus 1758, la période embryonnaire dure 8 semaines, elle serait plus courte chez les paninés (Pan et Gorilla). La compréhension de l'origine phylogénétique de notre embryogenèse nécessiterait de pouvoir l'étudier chez les espèces fossiles. Or il ne reste que des fragments d'os, adultes le plus souvent, ce qui peut constituer un obstacle. Il existe pourtant une méthode développée au Muséum national d'Histoire naturelle de Paris depuis plus de 30 ans, validée par l'Académie des sciences de l'Institut de France (1988, 2006), la chaire de paléoanthropologie et de préhistoire du Collège de France (Yves Coppens, 1996) et plus récemment par l'Habilitation à Diriger des Recherches (2011). Cette méthode mise au point avec la téléradiographie et des statistiques, bénéficie désormais de l'application de la scanographie aux collections ostéologiques.

Comment retrouver l'embryogenèse d'un crâne fossile ? Aux stades embryonnaires, le crâne se limite à la base cartilagineuse, plane chez tous les vertébrés, alignée sous le tube neural dans l'axe horizontal de l'embryon. Au terme des 8 semaines chez l' Homo sapiens, le segment postérieur (basi-sphénoïde, basi-occipital, capsules otiques) est redressé, basculé vers l'avant et le bas. Cette verticalisation conditionne la position du tronc cérébral et de la moelle épinière ainsi que celle de la future loge cérébelleuse, alors que le système nerveux sus-jacent n'a pas encore d'hémisphères cérébraux. Cette découverte a invalidé le paradigme de la poussée encéphalique de Franz Weidenreich (1948) vue comme la première cause mécanique du redressement. La rotation vers le bas se fait en deux temps. Un nouvel angle a été défini pour mesurer la première rotation avec des téléradiographies. La tomographie permet pour la première fois de chercher les corrélations entre l'amplitude de rotation du sphénoïde et celle des os connexes para-sagittaux (les pyramides pétreuses) et de les comparer entre des taxons actuels et fossiles. Le protocole biométrique a été appliqué à une série d'âge croissant de chimpanzés (collections Institut de Paléontologie Humaine, n= 41), à une patientèle d'adolescents et d'adultes de l'Hôpital Américain de Paris à part égale d'hommes et de femmes (n = 55) ainsi qu'à des scanners de crânes fossiles suffisamment conservés pour reconstituer leurs trajectoires embryonnaires, soient 5 Homo neanderthalensis et 2 Homo sapiens du Pléistocène supérieur (collections Muséum national d'Histoire naturelle) et 3 Homo erectus javanais du Pléistocène moyen (programme “Hominids in the Quaternary: Environments and Behaviours” de l' UMR 7194 CNRS en Asie du Sud-Est dirigé par François Sémah).

Si le redressement embryonnaire entre le chimpanzé et Homo sapiens est indéniable, il fallait le mesurer pour Homo erectus et Homo neanderthalensis car leur loge cérébelleuse est plus élevée que sapiens. Les angles sont plus ouverts. Les conclusions taxonomique et posturale sont simples : 1° l'identification de sapiens dans le registre fossile doit commencer par la mesure des angles de rotation embryonnaire, la forme et le volume de la voûte crânienne étant plus tardifs dans la chronologie du développement et 2° l'équilibre postural des Homo erectus et Néandertaliens assuré par leur cervelet était différent de sapiens.


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