La question des premières migrations dans les îles du bassin méditerranéen est complexe et a fait l'objet de longues controverses. En effet, la vision qui est restée longtemps dominante (Cherry, 1981) proposait une venue tardive des premières populations sur ces îles, il y a environ 7 000 ans, avec une arrivée plus tardive encore pour les îles cycladiques (autour de 5 000 ans). Les découvertes effectuées depuis une décennie, notamment en Crète sur les sites de Preveli à Plakias, remettent en question ce paradigme, montrant qu'il y aurait eu des occupations des îles dès le Paléolithique Moyen/Inférieur. Cependant, la communauté scientifique a besoin, afin de trancher définitivement en faveur d'une occupation précoce en mer Egée, de découvertes archéologiques incontestables, en stratigraphie et associées à des datations numériques justes et fiables.
Le site de Stélida, à Naxos, répond à ce critère puisqu'en plus des nombreux artefacts lithiques associés au Paléolithique Moyen (voir pour certains au Paléolithique Inférieur) retrouvés en stratigraphie, des datations par luminescence y sont associées. Ce site, probablement occupé pour l'approvisionnement en matière première siliceuse, est étudié depuis 2013 par notre équipe (dir. Tristan Carter) dans le cadre du projet SNAP (Stélida Naxos Archaeological Project), avec une étude géochronologique associée, initiée en 2016. Celle-ci consiste à dater la dernière exposition à la lumière des sédiments issus des couches stratigraphiques dans lesquelles ont été retrouvées les artefacts lithiques. Plusieurs protocoles en IRSL (Infrared Stimulated Luminescence) ont été employés afin de conforter les résultats obtenus. Les premiers résultats terminus ante quem indiquent une présence sur le site il y a, au moins, environ 200 000 ans. Ils nous indiquent une probable nouvelle voie de dispersion humaine vers l'Europe au Pléistocène Moyen.